Pour les bébés nés en 2018,11 vaccins seront obligatoires, contre 3 seulement jusqu’à présent. Pour quelles raisons ? Y a-t-il des risques ? Cela s’impose-t-il ? Sébastien Drouet
La situation est-elle très différente d’auparavant ?
Non. Jusqu’à présent, 80 % des enfants étaient vaccinés contre les 11 maladies en question (les trois obligatoires : diphtérie, tétanos, poliomyélite + les huit recommandées : coqueluche, rougeole-oreillons-rubéole, hépatite B, bactérie Haemophilus influenzae, pneumocoque et méningocoque C). Histoire de tout remettre à plat, il y a eu récemment un brainstorming autour de l’obligation vaccinale. « En tant que médecins, nous nous attendions à ce que l’obligation soit supprimée et remplacée par une simple recommandation rappelant l’importance de vacciner les enfants pour éviter le retour de maladies graves, déclare Fabienne Kochert, pédiatre à Orléans. Mais en fait, une vive inquiétude sur ce qui se passerait si on supprimait toute obligation vaccinale a été mise en évidence. » Car si on ne les y oblige plus, 30 % des parents ne vaccineront pas leurs enfants. Avec pour conséquence la réapparition de certaines maladies graves. Devant ce constat, la ministre de la Santé, médecin elle-même, a décidé de rendre tous les vaccins obligatoires pour les enfants.
Quels sont les arguments des « anti » ?
L’un des composants de vaccin les plus craints est l’aluminium, utilisé comme adjuvant mais éliminé par l’organisme (ce dont doutent les réfractaires). « Il y a de l’aluminium, c’est vrai, mais en quantité infime, tempère Fabienne Kochert. Des recherches ont été faites, il n’y a pas de quoi fouetter un chat. Le vaccin est un médicament, il peut y avoir des effets secondaires. Mais par rapport aux bénéfices que l’on en retire, les risques sont très faibles. Très rarement, chez certaines personnes, l’aluminium pourra être mal résorbé au point d’injection, sans conséquence démontrée sur la santé. » Étonnamment, il n’y a qu’en France que cette méfiance est observée… Par ailleurs, parmi les vaccins qui posent le plus problème, on note celui contre l’hépatite B, qui donnerait (mais seulement en France !) la sclérose en plaques.
Faut-il faire 11 piqûres en même temps ?
Non ! Ce sont des vaccins combinés, il y en a plusieurs dans la même piqûre. Les nourrissons reçoivent deux injections à deux mois, deux autres à quatre mois. Cela vaccine déjà contre 7 des 11 maladies. Puis il y a un rappel à 11 mois. Les autres rappels se feront à 6 ans, 11 ans, puis 25 ans, etc. Concernant le vaccin ROR, il y a une injection à 12 mois avec un rappel à 15-16 mois. Enfin, au sujet du vaccin contre la méningite à méningocoque C, une injection est préconisée à 5 mois et un rappel à 12 mois.
Y a-t-il du lobbying de la part des laboratoires pour imposer ces 11 vaccins ?
C’est un faux problème, répond Fabienne Kochert : « Mettre au point un vaccin implique des recherches longues. Par exemple, un vaccin contre le méningocoque B, pas obligatoire en France (il l’est en Grande-Bretagne), ni même encore l’objet d’une recommandation, a demandé vingt ans de recherches, de la part de plusieurs équipes. » Sans compter le temps de fabrication. « L’unité de production, neuve, aux normes, met déjà cinq ans pour être construite, souligne Fabienne Kochert. De plus, un vaccin demande un contrôle très sérieux, tout au long de la chaîne de fabrication. Que les labos fassent un bénéfice n’est pas condamnable. Et les vaccins qui sortent aujourd’hui ne seront plus les mêmes dans trente ans. Tout évolue ! »
Est-ce vraiment utile de se faire vacciner ?
Autrefois, la mortalité infantile pour cause de maladie infectieuse faisait partie du quotidien. Aujourd’hui, grâce aux vaccins, dans nos pays développés, on a oublié tout cela. « Les gens n’y sont plus confrontés, remarque Fabienne Kochert, tandis que dans le même temps, sur les réseaux sociaux, ils lisent sur des forums des avis selon lesquels les vaccins peuvent être dangereux, etc. C’est cela qui prend toute la place dans leur esprit. Ils sont convaincus de la dangerosité des vaccins sans savoir contre quelles maladies ces derniers protègent leur bébé. »
Que dit la nouvelle loi ?
L’ancienne loi prévoyait 3 750 Ä d’amende, et jusqu’à 6 mois d’emprisonnement, aux parents qui refusaient de faire vacciner leurs enfants. Cette disposition sera supprimée à partir du 1er janvier 2018. En revanche les onze vaccins obligatoires seront indispensables à l’admission en collectivité (crèche, école, centre de vacances…), les enfants non vaccinés, en cas de maladie, risquant d’infecter les tout petits nourrissons pas encore protégés. « Nous avons eu l’an dernier plusieurs cas de rougeole dans plusieurs crèches d’Orléans, signale la pédiatre. Des nourrissons ont été contaminés par un enfant non vacciné qui avait attrapé la rougeole dans le sud de la France. »
Quid des enfants nés avant le 1er janvier 2018 ?
N’ayez pas d’inquiétude : sauf si vous faites partie des réfractaires, les pédiatres et médecins qui suivent les enfants ont déjà pris les devants. Les enfants sont vaccinés, puisque, même si ce n’était pas obligatoire, cela était déjà fortement recommandé par les professionnels de la santé.
Sur Internet : www.mpedia.fr, site web réalisé par des pédiatres de l’Association Française de Pédiatrie Ambulatoire, dont Fabienne Kochert est vice-présidente.