Voilà un moment que l’on entend parler de contraception masculine. Pourtant, les projets stagnent. Les hommes prendront-ils la pilule un jour ? Pas si sûr…
Puisque c’est la femme qui porte l’enfant, c’est à elle de prendre un moyen de contraception. C’est de cette façon que pense la majorité des gens. Pourtant, les rapports sexuels se pratiquent à deux et une grossesse, prévue ou non, devrait également concerner les deux parents. Force est de constater que la gent masculine n’est pas très enthousiaste à l’idée d’ingérer des hormones tous les jours, avec les risques que cela comporte en termes de santé, de prise de poids ou de libido. Et ce ne sont pas les derniers scandales qui ont éclaboussé les pilules féminines de troisième et quatrième générations qui vont arranger les choses.
État des lieux
Depuis que la pilule existe, les projets en matière de contraception masculine ont eu tendance à stagner. Concrètement, depuis les années 70, les recherches dans le domaine n’ont conduit qu’à l’amélioration du confort et de la fiabilité du préservatif. Reste aux hommes la solution de la vasectomie, méthode de stérilisation masculine qui ne bénéficie pas d’une image très virile et ne séduit que 0,5 % des Français, et celle du « retrait » dont la fiabilité reste aléatoire. En dehors de ces deux extrêmes, point de salut, si ce n’est le recours aux contraignantes injections intramusculaires et hebdomadaires d’énanthate de testostérone. Réglementée et soumise à conditions, l’administration de ce produit n’est cependant destinée qu’aux hommes de moins de 45 ans sans antécédents pathologiques, vivant en couple depuis un certain temps et dont la femme est hautement intolérante aux moyens de contraception. La durée du traitement est par ailleurs limitée à 18 mois. Bref, on a fait mieux dans le genre pratique…
Le plein de projets
Un traitement pilule-gel, par application cutanée, a été pensé bien avant le lancement des patchs féminins, sans pour autant aboutir. Malgré des premiers tests concluants, les firmes pharmaceutiques ne semblent pas vouloir lui allouer le budget nécessaire pour finaliser les essais et le mettre sur le marché. Le projet de « Risug », actuellement en préparation, a peut-être plus de chances de voir le jour. Il s’agit d’injecter dans le canal déférent, par lequel passe le sperme, un gel rendant les spermatozoïdes inféconds. Confortable, ne nécessitant pas d’opération et agissant pendant environ dix ans, le Risug est également réversible, c’est-à-dire qu’une autre solution permet de retrouver sa fertilité si besoin. S’il a du mal à se faire accepter dans l’Hexagone, il est déjà breveté dans plusieurs pays : l’Inde, la Chine, les États-Unis et le Canada. D’autres alternatives sont envisagées, comme la contraception thermique qui consiste à élever de 1 ou 2 °C la température testiculaire afin de réduire la quantité et la qualité de la production de spermatozoïdes.
Place au débat
Selon un sondage CSA de 2012, 61 % des hommes seraient prêts à prendre une pilule contraceptive masculine. La contraception masculine les intéresse pour une question d’égalité, mais aussi parce que beaucoup d’hommes deviennent pères malgré eux, lorsque leur compagne décide de garder l’enfant contre leur gré. La contraception masculine gênerait surtout une frange conservatrice du corps médical. Seule une action publique ou politique pourrait réellement faire avancer les choses, mais elle n’est pas à l’ordre du jour, d’autant plus que, bizarrement, les féministes ne sont pas forcément les premières à abonder en ce sens. Au XXIe siècle, la gestion et la maîtrise de la fertilité du couple ne reposent que sur les épaules de la femme. On pourrait croire qu’il est temps de répartir les tâches… Mais confier cette implication à l’homme reviendrait à lui octroyer une certaine forme de pouvoir et à enlever une part de liberté à la femme ; elle ne serait plus tout à fait libre de choisir si elle veut devenir mère ou non. Rappelons que l’arrivée de la contraception orale pour les femmes, il y a quelques décennies, était une grande avancée pour l’émancipation féminine. Il ne faudrait donc pas retourner en arrière. Le débat n’est pas près d’être clos.