Tous les ans, depuis 1992, à la mi-août, des milliers de lecteurs fidèles se jettent sur le nouveau roman d’Amélie Nothomb. Son dernier opus : Les Aérostats, a été publié le 19 août chez Albin Michel ; avec un tirage estimé à 200 000 exemplaires.
En 1967, la date de « sortie » du beaujolais nouveau fut fixée au 15 novembre, chaque année, puis finalement au troisième jeudi de ce même mois. Le rapport avec Amélie Nothomb ? Il est évident, le vin primeur et l’opus(cule) rituel de la romancière sont des marqueurs obligés et intangibles du deuxième semestre de l’année. Ne parle-t-on point de cru quand il s’agit d’évoquer chaque production de la native d’Etterbeek, en Belgique ?
La plupart des romans d’Amélie Nothomb sont des contes, à la morale toute particulière, et dont la brièveté n’est pas nécessairement liée à un quelconque manque de profondeur, quoique… De toutes manières, à quoi bon ergoter, ses livres sont des succès car ils ne mentent pas sur leurs promesses, même s’ils contiennent trop peu et trop superficiellement pour ceux qui ne la supportent pas. Amélie Nothomb est bien plus qu’une romancière, c’est une marque, qui a fidélisé ses adeptes au fil des années et qui propose invariablement un nouveau « produit » en août. C’est une autrice qu’il est de bon ton d’aimer ou de détester mais il y a largement de la marge, entre ces deux extrêmes, pour lui reconnaître un certain talent mais aussi pour regretter que ses livres ne soient que des nouvelles allongées qui laissent assez souvent sur sa faim.
Ah, mais lis Nothomb ! Ce n’est pas une injonction mais presque, et les crus successifs ont beau être de valeur inégale, la curiosité l’emporte et ma foi, le temps de sa lecture a au moins deux vertus : primo, il distrait, par sa légèreté. Secundo, en à peu près une heure et d’une seule traite, l’affaire est entendue. Il sera alors temps de passer à quelque chose de plus roboratif. Ce qui est assez amusant est que la femme au chapeau n’écrit jamais le même livre mais procède presque toujours de la même façon : un point de départ original, un développement avec d’incongrus rebondissements, fluidifié par des dialogues souvent savoureux, et un dénouement parfois bâclé comme si Nothomb, à l’instar d’un journaliste, se devait de rendre une copie qui ne dépasse pas un certain nombre de signes, espaces compris. À moins que ce ne soit l’heure du thé (ou du champagne, plutôt !) et qu’Amélie soit pressée d’en finir.
À l’heure où ces lignes seront lues, Les Aérostats, le 29e Nothomb, sera déjà un succès de librairie, c’est couru. Sera-ce un bon millésime ? Comme d’habitude, les avis seront partagés et c’est très bien ainsi.
Alain Souché