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Alexis Laipsker, Poker ou polar, seule l’envie compte

L’un des plus grands spécialistes français de poker, Alexis Laipsker, exerce ses talents de bluffeur dans le monde entier. Plus récemment, il s’est lancé avec succès dans l’écriture de romans qui foutent les jetons. Rencontre avec une nouvelle voix du polar.

Il accorde beaucoup d’importance à la crédibilité des faits et à leur logique, la meilleure façon de captiver le lecteur.

Plutôt habitué aux tables de poker, c’est à la table de la maison de la presse de Saint-Martin-de-Ré, en pleins courants d’air, que je rencontre Alexis Laipsker. Ce jour-là, il assure les dédicaces pour son deuxième polar, Le Mangeur d’âmes. À 51 ans, Alexis Laipsker ne s’est pas contenté d’écumer les casinos. Impossible de le faire rentrer dans une catégorie, il excelle d’un univers à l’autre : hôtellerie de luxe, commerce, communication, télévision, presse écrite, ambassadeur de la Ligue française de poker, directeur de la com de Poker Stars, créateur d’une web tv, présentateur de la Maison du Bluff (émission de téléréalité centrée sur le poker), rédacteur en chef du magazine Poker pro… Quand on lui demande combien de vies il a, il répond avec un sourire : « Je ne sais pas parce qu’elles ne sont pas encore terminées. »  S’il a écrit déjà plusieurs ouvrages consacrés au poker, il se lance en 2020 dans un nouveau genre. Grand lecteur, Alexis finit par rejoindre la voix du polar : « À chaque fois que je terminais un livre, ça me donnait envie d’écrire. Soit parce que je me disais que je pouvais faire mieux, soit parce que je trouvais le livre très bon et que cela me donnait envie, moi aussi, de raconter des histoires. Alors quand j’ai eu un creux, j’en ai profité pour écrire. » L’envie et le plaisir, les deux baromètres qui gouvernent ses choix : « Quand j’ai commencé, je ne savais pas où j’allais, je ne connaissais personne dans l’édition et je savais que j’avais peu de chances d’être publié. Je n’ai pas fait de plan, j’ai commencé par un chapitre et quand je me relisais, je trouvais que mon écriture fonctionnait bien, alors j’ai continué en prenant beaucoup de plaisir dans l’écriture. » Finalement, tout s’enchaîne vite : il envoie son manuscrit aux éditions Michel Lafon, une semaine après il signe son contrat pour son premier thriller, Et avec votre esprit… Un premier coup d’essai, converti en coup de maître salué par les critiques. Repérés par un producteur, ses deux polars vont être portés à l’écran. En véritable homme-orchestre, Alexis Laipsker travaille sur l’écriture de ses scénarios.

Une méthode Laipsker pour le polar ?

Alexis Laipsker, Le manger d’âmes, aux éditions Michel Lafon

 L’auteur ne s’impose pas de jour d’écriture, ni un nombre de pages à rédiger, ni de rituels. Il ne se force jamais, il prend juste du plaisir : « Si je n’écris pas pendant plusieurs jours, cela n’a aucune importance. D’ailleurs, je suis incapable d’avoir un calendrier avec mon éditeur, j’ai la chance d’écrire vite. Je peux aussi bien écrire dans un train, avec des enfants qui crient autour de moi, que dans le silence de la nuit. Ce qui compte, c’est d’être fier du bouquin que l’on rend. » Sa technique d’écriture consiste à donner du rythme à son histoire avec des chapitres courts qui tiennent le lecteur en haleine. Pour Le Mangeur d’âmes, il a cette fois bâti un plan chapitré, tout en précisant qu’il n’est pas figé et que celui-ci évolue au fil de son écriture : « Inspiré par un fait avéré, j’avais le décor : une ville sinistre sous la neige, des enfants qui disparaissent, des oiseaux qui tombent du ciel, une sorcière. J’ai commencé par écrire la fin. » Il accorde beaucoup d’importance à la crédibilité des faits et à leur logique, la meilleure façon de captiver le lecteur.

Il visualise la scène, puis l’écrit, il aime jouer avec des rebondissements, et assure le coup de bluff final. Une atmosphère mystique plane dans les pages de son dernier polar, généreux en scènes de crime et en hémoglobine : « Je suis issu de la contre-culture. Ado, je dévorais Stephen King et avec l’âge, je me suis intéressé à des sujets de fond. J’ai lu Le dictionnaire du diable (NDLR : un recueil de l’américain Ambrose Bierce comprenant 998 définitions), qui m’a permis de nourrir un chapitre. » Le prochain polar est déjà écrit, mais cette fois avec trois narrateurs et pas une goutte de sang ! Le romancier reconnaît mettre une part de lui-même dans chacun de ses personnages : « Sans doute mon humour potache, et peut-être aussi la pudeur de mes personnages qui ne veulent pas faire étalage de leurs blessures. »

Enfin, ce que l’on retient chez l’homme, c’est sa part d’héroïsme qu’il porte avec modestie. Quand on évoque la fillette qu’il a sauvée de la noyade en plongeant dans la Seine : « C’est à la fois un sentiment de culpabilité – ça s’est joué à une minute, j’entendais des cris d’enfant, je croyais qu’elle jouait, j’ai failli ne pas y aller – et une charge émotionnelle compliquée à porter. »

Marie-Zélie Cupillard

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