On la redoute : au moment de l’adolescence de nos filles, l’anorexie plane comme la maladie de notre époque. Mais on ne connaît pas grand-chose de cette pathologie complexe. Une diététicienne et une psychologue nous éclairent sur le sujet.
Le sujet est sensible. Tellement qu’il est nécessaire de reprendre les définitions. L’anorexie est avant tout un symptôme, le signe que quelque chose ne va pas. Une perte de poids très rapide peut ainsi être précurseur d’une maladie telle la dépression, cela arrive chez les enfants, mais aussi de schizophrénie, essentiellement chez les garçons, ou alors d’anorexie mentale chez les filles. Selon les études, entre 0,5 et 2 % des ados seraient ainsi touchés dans les pays occidentaux. Mais la catégorie des enfants de 5 à 12 ans est de plus en plus concernée. Un constat douloureux et aux conséquences parfois très graves. « Cela rappelle un peu les problèmes d’addiction », explique la psychologue Domitille Blanchard.
L’exigence de l’image et de l’alimentation
Et comme pour les addictions, il est parfois difficile de se rendre compte qu’un proche souffre. Pour l’anorexie, il faut surveiller avant tout son poids. Si la perte est radicale et très rapide, elle s’accompagne souvent de repas sautés, d’une alimentation de moins en moins riche. « Un malade va commencer par supprimer les féculents et les matières grasses », précise Bernadette Dijoux. Les prétextes peuvent être alors nombreux pour ne plus manger et parfois cela s’accompagne de vomissements voire même d’utilisation de laxatifs, dans les cas les plus graves. Selon la diététicienne, l’anorexie mentale, comme maladie, touche surtout des jeunes filles prépubères, très exigeantes vis-à-vis de leur image. « Elles ne sont jamais satisfaites, elles refusent tout ce qui a un rapport avec la féminité, avec la sensualité, elles sont généralement solitaires et renfermées. Mais attention, ceci n’est pas systématique. »
« Un Superman, ça n’existe pas »
En fait, pour Domitille Blanchard, « le corps exprime clairement un conflit interne. C’est d’ailleurs en cela que l’anorexie s’apparente à la boulimie. Ces deux maladies appellent à quelque chose qui ne va pas. » Souvent liées à la séparation, à une relation délicate avec la mère, à un refus de grandir, à une angoisse profonde : les causes sont complexes. Domitille Blanchard se veut d’ailleurs très prudente. « La culpabilité des parents est inéluctable, c’est suffisamment dur pour eux. » Cependant, selon elle, « chaque individu, s’il fait ce qu’il faut pour lui, peut aider le patient à aller mieux ». Un véritable travail philosophique s’engage alors ; prendre soin de soi et ainsi faire du bien au malade. « Il faut aussi savoir reconnaître ses limites. Personne ne peut être un surhomme ; un Superman, ça n’existe pas dans ce genre d’événements. »
Il est également important de se faire aider par un professionnel. Bernadette Dijoux conseille même de prendre rendez-vous avec un nutritionniste dans un premier temps, et ainsi d’y aller en douceur. « Il faut essayer de ne pas être agressif ni de montrer de la panique. » Mais l’essentiel est surtout de consulter le plus tôt possible. La diététicienne estime ainsi qu’un malade a plus de chances de guérir s’il est pris en charge dès les premiers symptômes. Après 25 ans, il est beaucoup plus compliqué de lutter contre l’anorexie.
INFOS
• Domitille Blanquart, psychologue à
Saint-Jean-le-Blanc
• Bernadette Dijoux, médecin maladies
métaboliques et diététicienne à Orléans
• La Maison de Solenn
97, boulevard de Port-Royal
01 58 41 28 14
Demander à parler au responsable des troubles du comportement alimentaire.