La vie à Bordeaux, ce n’est peut-être pas le Pérou, mais Carmen, artiste-plasticienne péruvienne, y a posé ses valises en 2005 et s’y plait.
Entre deux éclats de rire, Carmen nous ouvre les portes de son atelier et nous raconte son histoire. Enseignante en espagnol à l’IUT de Bordeaux, elle est surtout une artiste-plasticienne qui tisse sa toile dans le monde de l’art. A 44 ans, cette fille de la forêt péruvienne garde un regard critique sur la ville… Une belle rencontre en perspective.
Comment êtes-vous venue vivre à Bordeaux ?
C’est le hasard qui m’a amenée ici. Après deux ans passés en Corée du Sud, on a proposé à mon mari de venir à Bordeaux pour faire un doctorat en littérature contemporaine. Comme nous adorons voyager et découvrir de nouvelles cultures, nous avons saisi cette belle opportunité. La France a beaucoup d’influence pour les artistes comme moi.
Qu’appréciez-vous en particulier ?
J’aime beaucoup l’architecture de la ville, notamment le mascaron. Pour moi qui travaille autour du portrait, je trouve cela très intéressant. C’est ancien mais contemporain à la fois. Cela donne à la ville un caractère vraiment spécial. Avant de venir en France, je gardais le souvenir d’une journée passée à Bordeaux et la ville m’avait semblé noire et sombre. Depuis, elle a bien changé ! J’aime ce que la ville est en train de devenir.
Vous êtes-vous sentie bien accueillie ?
Je ne vais pas me plaindre. J’ai une amie bordelaise qui m’a accueillie, ouvert son coeur et sa maison. Mais avec les autres personnes, c’était plus compliqué, avec la barrière de la langue, mais aussi parce que les habitudes ici sont différentes. Au Pérou, le grand repas de famille, c’est le dimanche. Mais en France, on mange beaucoup tous les jours. Entrée, plat, dessert… et le fromage. Dans mon pays, on mange le fromage le matin. Au départ, je n’arrivais pas à m’y faire.
Qu’est-ce qui vous surprend dans votre quotidien bordelais ?
Ces derniers temps, je trouve qu’il y a de plus en plus de personnes qui mendient dans la rue avec des chiens. Des jeunes, des femmes… et ça m’interpelle beaucoup car dans mon pays ça n’existe pas. Ou pas de la même manière. Au Pérou, les mendiants vendent des bonbons pour gagner un peu d’argent. La misère est différente. Il y a des quartiers pauvres, mais ce n’est pas pareil qu’en France. Tout cela me touche vraiment…
Qu’aimeriez-vous importer du Pérou ?
La gaieté ! Cela me manque. Au Pérou, les personnes sont rigolotes et font des blagues tout le temps. À Bordeaux, il y a des gens très sympas et drôles, mais il faut les connaître avant. Dans mon pays, tu peux parler avec n’importe qui. Dans le bus, tu fais la discussion avec tout le monde, même si tu ne connais pas les personnes. Ici, les gens sont plus fermés. Et puis, j’aimerais plus de soleil et plus de fruits ! Au Pérou, il y a des variétés qu’on ne connaît pas en France. En bananes, on en a de plusieurs couleurs. Des rouges, des bleues, des petites, des grandes…
Avez-vous le mal du pays ?
Oui ! Surtout maintenant avec la pluie. Ce temps me rend triste mais j‘essaye de me réchauffer comme je peux. Pour mettre un peu de gaieté, j’écoute de la musique péruvienne, celle de la forêt ! Elle est plus gaie que celle de la montagne. C’est sûrement dû au climat. Dans la région de la forêt, il fait toujours chaud et les gens sont joyeux et ça se ressent dans la musique. Ça donne de la joie de vivre et surtout envie de danser.
Vous voyez-vous poursuivre votre vie ici ?
Quand mes filles seront grandes, l’idéal pour moi, ce serait d’habiter 6 mois ici et 6 mois là-bas. D’un côté, je pourrais profiter de ma famille et de mes amis au Pérou tout en créant. Et à Bordeaux, je pourrais faire des expositions et voir mes filles… et mes petits-enfants peut-être !