DRESSING COMMUN: QUELLES SONT LES LIMITES DE CE PARTAGE MÈRE FILLE, CONSENTI OU IMPOSÉ ?…
Le shopping, ça nous rapproche de nos filles, c’est un moment de complicité, d’échanges et aussi parfois de désaccords. Si nos ados aiment piocher dans nos armoires, elles ne sont pas forcément prêtes à nous voir porter les mêmes tenues qu’elles.
Il y a une période où l’on fait notre possible pour avoir notre propre look et nous démarquer de celui de notre mère. Jeune femme, nous échangeons nos vêtements avec elle jusqu’à adopter le même style. Un premier constat s’impose, les frontières vestimentaires s’estompent entre les générations. Plusieurs marques ont bien compris les enjeux marketing de ce rapprochement, à l’instar de Comptoire des Cotonniers qui joue sur le duo mère-fille pour ses campagnes de pub. Antik Batik, Isabel Marant, Paul and Joe… proposent des collections copiées collées mère-fille. On s’habille de plus en plus de la même façon quel que soit son âge. Nostalgie de l’adolescence ou volonté de rester à la mode, de paraître jeune ? Qu’importe. La mode ne fait d’ailleurs que se répéter : le retour des Stan Smith, des Ray Ban aviator, du jean élastisse rebaptisé slim, le perfecto… en sont de parfaites illustrations.
COMMENT BIEN VIVRE LE CO-DRESSING ?
Mais ce sont les filles qui dénichent les plus grandes tendances et les font découvrir à leur mère. Emprunter les vêtements de sa fille qui suit les dernières tendances, c’est aussi plus économique. Le phénomène mère-fille s’applique et s’explique sur toute la durée d’une vie. Quel meilleur exemple de fi gure féminine que sa mère ? Isabelle Decoopman et Elodie Gentina-Dancoine, professeures à SKEMA Business School, on mené une étude auprès de plus de 900 mères d’adolescentes. Elles ont identifié trois groupes de mères, selon leur propension faible, moyenne et forte à échanger des vêtements avec leur fille : « les réfractaires », « les disposées » et « les adeptes ». « Les réfractaires » déclarent ne jamais échanger de vêtements avec leur fille alors que « les disposées » le font occasionnellement. Les « adeptes » échangent très fréquemment des vêtements, et certaines d’entre elles font armoire commune. Les comportements de co-consommation (shopping commun, achats en co-propriété et partage de vêtements) répondent à des logiques très différentes, de l’ordre de l’économique (volonté de diversifier la garde-robe), du symbolique (générer des liens affectifs mère-fille) et de l’identitaire (projection de la mère vis-à-vis de sa fille adolescente qui lui renvoie une image idéale de la femme) selon les profils de femmes.
Nathalie, 43 ans, est une adepte du co- dressing avec sa fille Evie, 17 ans. Elles partagent les mêmes goûts. Cela fait deux ans qu’elles échangent leurs vêtements. L’avantage est aussi économique, leur dressing est commun pour les tops, les accessoires (bijoux, chaussures) et les manteaux. « Mais je ne porte pas les robes de ma fille qui sont trop courtes, je ne veux pas non plus passer pour une midinette qui ne voudrait pas faire son âge », explique Nathalie. Les limites du dressing commun entre Nathalie et Evie ? Les sous-vêtements, et les baskets. L’année prochaine, Evie partira faire ses études dans une autre ville et chacune devra se contenter de ses affaires. Anne- Christine, elle, joue entre deux catégories : réfractaire en apparence, elle est disposée à ce partage, même si elle reconnaît que Victoire se sert dans son placard mais toujours en cachette. « Je ne demande pas car je sais que c’est non. » « Heureusement, nous n’avons pas la même taille de chaussures, précise Anne-Christine, mais parfois on achète des choses en commun. » Sa limite ? « Qu’elle ne m’abîme pas mes affaires. En fait, je suis très fière qu’elle aime ce que je porte ! Je me dis que je ne suis pas tout à fait has been » concède Anne-Christine. « On se rejoint sur certains vêtements, j’aime bien lui prendre ses vestes. » Victoire conseille sa mère sur le choix de ses tenues, et c’est bien connu, la vérité sort de la bouche des enfants. Pas de faux semblants, en cas de fashion faux-pas, les filles ne passent rien à leur mère. Qu’on se le dise !