Cette année c’est lui qui met en scène My Fair Lady, le nouveau spectacle de la Fabrique Opéra Centre-Val de Loire. Rencontre avec l’homme de situation. Marie-Zélie Cupillard
Franck Jublot a plusieurs partitions à son répertoire : clown, comédien, metteur en scène, écrivain. Il a appris et travaillé avec Jean-Claude Cotillard, Jacques Lecoq, Michael Lonsdale… Il a été en résidence. L’époque, où il se mentait à lui-même et faisait semblant de vouloir devenir un autre est révolue « je préfère être ce que je suis plutôt qu’être ce qu’on attendrait de moi ». À 50 ans, Franck est un homme heureux. Et pour ce faire il ne cherche ni la gloire, ni les paillettes, mais simplement à vivre son métier. Être ce que je suis plutôt que ce qu’on attendait de moi et qui ne me correspond pas. C’est sans doute pour toutes ces bonnes raisons que l’homme a monté ses propres compagnies Le Théâtre de l’Imprévu et le compagnie Chat Pitre.
La Fabrique Opéra
Il avait entendu dire que Clément Joubert pratiquait l’entre soi, mais en décembre 2016 quand il rencontre le chef d’orchestre il voit les choses autrement : « Je n’ai pas l’expérience ni l’envie du réseau, alors quand Clément Joubert a voulu me rencontrer j’avais un a priori. Mais quand j’ai rencontré Clément j’ai tout de suite été touché par son honnêteté de travail et son souci de transmettre. Je le considère comme un grand pédagogue. »
My Fair Lady, Un livret misogyne ?
« Il faut remettre cela dans le contexte de l’époque, le rapport de valeur n’est pas le même. En effet, en 1850, époque où l’auteur situe l’action, les femmes n’avaient pas le droit de se promener seules dans la rue au prétexte qu’elles étaient fragiles et qu’il fallait les protéger d’éventuels agresseurs. George Bernard Shaw, l’auteur, se moque de cela. Il met également en perspective le rapport de classe qui s’oppose en pleine révolution industrielle. Même s’il reste une référence, je trouve que le film a mal vieilli. »
Bio express
1985 Conservatoire d’Orléans – élève de Cotillard
1988 En résidence
1992 École Lecoq à Paris
1998 Les Nouveaux Nez
Musique du moment
Space Odity – David Bowie
Une vocation ?
Suite à un choc émotionnel, il décrète qu’il sera clown : « “Quand j’avais 5 ans je m’ai tué” d’Howard Buten, c’était moi à 8 ans ! Je voulais arrêter le côté larmoyant des adultes. » Mais la pudeur arrête là la confidence. Franck Jablot a toujours imaginé des histoires. Cela semblait naturel chez lui, à l’instar de cette anecdote, dès l’école primaire : « nous n’avions pas la télé, alors à l’école j’inventais des histoires de film qui n’existaient pas, ma mère a été convoquée car on trouvait que je regardais trop la télé. » Puis à Saint-Denis de l’Hôtel, j’ai gagné le 1er concours de chant. Je suis rentré avec un beau ballon de foot en cuir mais ma mère ne m’a pas cru, peut-être que mon exigence de profonde honnêteté dans mon travail remonte à ce jour ?
Quel choix de mise en scène pour le Zénith d’Orléans ?
« Les choix sont évidemment liés au public et à l’espace, mais une bonne mise en scène, c’est trouver l’équilibre entre le fond et la forme. » Pour la scénographie et le design, Franck travaille avec une classe 100 % filles du BTS Charles Peguy. Lors de leur premier rendez-vous une élève a lâché direct : « elle c’est une cruche et lui un connard ! » Alors que lui avait en tête l’ascension sociale, cela a complètement changé son regard sur le traitement des personnages. « Cela m’a permis de rebondir et de chercher une vision actuelle de l’œuvre. Je replace l’histoire dans la fin des années 60 avec le mouvement MLF. Higgins est symbolisé par un bloc de granit et Elisa par une coulée de lave. Dans l’acte 1, c’est la victoire de la science sur la femme. L’acte 2 inverse les choses, Elisa prend le dessus, les deux personnages se transforment et cela devient une histoire d’amour. Normalement, on doit suivre le livret, mais la traduction permet quelques interprétations ».
PERSO
3 fils Arthur, David et Jules
qui évoluent dans un univers créatif et artistique.