Les pouvoirs publics semblent enfin avoir pris la mesure de ce redoutable fléau. Des sites web mis en ligne par les académies et le ministère de l’Éducation nationale donnent des conseils aux harcelés. Plus concrètement, des actions sont mises en place dans certains collèges et lycées. Sébastien Drouet
Même s’il existe au lycée (2,1 %) et, de manière moins violente, en primaire, le harcèlement est surtout le fait du collège : 10 % de collégiens en sont victimes, dont 7 % sévèrement. Des élèves cibles de brimades, moqueries, mises à l’écart, insultes, voire violences physiques, en permanence, de la part de « camarades ». Les réponses ? La parole des adultes en général suffit – encore faut-il être au courant des problèmes –, avant des sanctions contre le ou les auteur(s) de ces agissements, ou bien le changement d’établissement pour la victime. Dans les cas les plus graves, tout un arsenal juridique se met en place contre le fautif, allant du rappel à la loi par un juge au placement ou, pour les plus de 13 ans, à de la prison et à 7 500 € d’amende.
S’il a toujours existé, le harcèlement revêt depuis quelques années une autre forme : le cyber-harcèlement, via les réseaux sociaux, « surtout le fait des filles, indique Sylvain Disson, délégué académique à la vie lycéenne et collégienne. Elles relaient des rumeurs, des insultes sur les apparences physiques, diffusent des photos gênantes. » Un moyen ravageur de distiller rapidement un poison, de façon anonyme (rien de plus facile que se cacher derrière un pseudo), et sans limite temporelle. Difficile à mesurer réellement et à contrer, donc. Le harcèlement plus « classique », en revanche, qui mène lui aussi au mal de vivre et, dans les cas les plus extrêmes, au suicide, trouve désormais ses réponses, ou du moins des pistes, depuis qu’en 2013, la loi a fait de la lutte contre ce fléau une priorité.
Ambassadeurs et Sentinelles sur le terrain
Les Ambassadeurs forment un dispositif qui fonctionne. « Des lycéens qui se sentent concernés, par empathie, ou parce qu’ils ont été victimes, voire auteurs, sont formés depuis 2013 pour apporter dans les collèges une sensibilisation de pair à pair, explique Sylvain Disson. Dans l’Académie, on compte un millier d’Ambassadeurs, qui suivent une journée de formation (conférence, réflexions) visant à reconnaître le harcèlement, ses conséquences, les ressources pour le combattre, avant de bâtir un projet : rencontrer les collégiens, créer des animations, organiser une cellule de veille. » Ils ne gèrent pas directement les cas, mais contribuent à libérer la parole, à éveiller les consciences des plus jeunes.
Autre exemple au collège Étienne-Dolet d’Orléans. Là, ce sont les Sentinelles qui veillent, une douzaine de collégiens, de la 5e à la 3e, chargés de repérer des proies possibles dans la cour de récré pour les sortir de leur isolement. Un stage de quatre jours donne à ces volontaires les clés pour être attentif aux autres, déceler d’éventuels soucis. Une fois par mois, le groupe, qui comprend aussi des enseignants, parents d’élèves, la Conseillère principale d’éducation (CPE) et l’infirmière, se réunit pour échanger sur les situations rencontrées. Présentes sur le terrain, les Sentinelles mènent aussi des actions, passent dans les classes pour faire de la sensibilisation. « L’objectif, c’est que tout le monde sache que le harcèlement n’est pas normal, déclare Nathalie Claude, la CPE. Et que dénoncer cela, ce n’est pas être une balance. » Quelques cas sont passés à travers les mailles du filet, certes, mais grâce aux Sentinelles, des victimes potentielles ont sans doute été sauvées de situations dramatiques.
Site académique de la lutte contre le harcèlement : www.ac-orleans-tours.fr/pedagogie_action_educative/vie_de_leleve/lutte_contre_le_harcelement/
Site national : www.nonauharcelement.education.gouv.fr
Non au harcèlement : par téléphone au 3020. S’il s’agit de cyber harcèlement, contacter Net écoute au 0800 200 000