Le magazine féminin des Orléanaises (depuis 2010)

Le football féminin ou le miroir des sociétés

Equipe-North-London-EDITH

L’histoire du football féminin ressemble davantage à une longue bataille pour l’égalité et le respect, au milieu des tacles assassins et des jugements acerbes, qu’à un match de gala sur la piste aux étoiles. Si ces dernières années, ce sport attire de plus en plus de pratiquantes et séduit un public toujours plus nombreux et passionné, cela n’a pas été le cas de tout temps. Retour sur l’histoire d’une discipline qui a dû s’imposer davantage en dehors des terrains que dessus.

Nous sommes le 9 mai 1881. Édimbourg, terre où serait né, selon certaines légendes, le football, est le théâtre de la première confrontation opposant deux équipes féminines, la sélection anglaise et sa rivale écossaise. Le match attise la curiosité des observateurs, notamment des journalistes, qui semblent davantage intéressés par la tenue des joueuses que par la beauté de la rencontre. « Les jeunes femmes, qui devaient avoir entre 18 et 24 ans, étaient très bien habillées. Les Écossaises portaient des maillots bleus, des culottes blanches, des collants rouges, une ceinture rouge, des bottes à talon et un capuchon bleu et blanc. Leurs sœurs anglaises avaient des maillots blancs et bleus, des collants et une ceinture bleue, des bottes à talon, et un capuchon blanc et rouge » décrit, le lendemain du match, le Glasgow Herald. Une semaine plus tard, quelques milliers de personnes assistent à un deuxième match… qui n’arrivera jamais à son terme. Au bout d’une heure, quelques spectateurs envahissent la pelouse et conspuent les joueuses dans une manifestation de sexisme d’une rare violence avant d’entraîner un mouvement de foule haineux. « Vers la fin, quelques brutes se sont introduites sur le terrain, suivies d’une centaine d’autres qui ont violemment bousculé les joueuses. Elles ont dû se réfugier dans l’omnibus qui les avait transportées sur le terrain. Elles n’étaient pas au bout de leurs peines, car la foule a commencé à détruire les poteaux et à les jeter contre le véhicule en mouvement. S’il n’y avait pas eu de policiers, elles auraient pu être blessées », témoigne alors le Dunferlime Journal. Le ton est donné et les grands obstacles auxquels sera confronté le football féminin tout au long de son histoire sont d’ores et déjà plantés.

Coup de sifflet

Le 5 décembre 1921, la Football Association (FA), l’organe omnipotent qui règne alors sur le football anglais et donc sur le football mondial, décide brusquement d’interdire le football féminin. Les relents misogynes, mal dissimulés sous de baroques justifications sanitaires et morales, sifflent la fin de la récréation. Il n’en fallait pas moins pour raviver les discours haineux. Le coup porté à la discipline lui est fatal. Le public déserte les stades. La France se fait aussi l’écho de ce grand bond en arrière. Henri Desgrange, l’un des pères fondateurs du Tour de France, restera célèbre pour cette sortie qui trahit bien
le sentiment rance de l’époque :
« Que les jeunes filles fassent du sport entre elles, dans un terrain rigoureusement clos, inaccessible au public : oui d’accord. Mais qu’elles se donnent en spectacle, à certains jours de fêtes, où sera convié le public, qu’elles osent même courir après un ballon dans une prairie qui n’est pas entourée de murs épais, voilà qui est intolérable ! ».

En 1926, le décès en plein match de C.V. Richards finit d’achever un sport moribond. En 1932, la FSFSF, qui encadre le sport féminin, interdit la pratique du football aux femmes. Le Championnat de France féminin s’arrête en 1933. En 1941, le régime de Vichy, qui encourage par ailleurs la pratique sportive féminine, « interdit vigoureusement », le football, alors jugé « nocif pour les femmes ».

La renaissance et le nouvel âge d’or

Il faudra attendre 1970 pour que les grandes fédérations européennes décident de relancer le football féminin dans leurs pays respectifs et 1991 pour que les instances européennes (UEFA) et mondiales (Fifa) n’organisent de nouveau des rencontres officielles internationales, avec, notamment, l’organisation de la première Coupe du monde. Depuis, le football féminin n’a de cesse de battre, d’édition en édition, les records d’affluence et d’attirer licenciées, supporteurs et spectateurs enflammés. Ce Mondial en France devrait être, selon toute vraisemblance, l’occasion de constater que le football féminin est entré dans un nouvel âge d’or.

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