Le magazine féminin des Orléanaises (depuis 2010)

« Les hommes et les femmes ne jouent plus de rôles stéréotypés »

Dans les premiers temps d’une rencontre, l’amour est autant une question de phéromones, d’odeurs, que de regards ou de mots…

Les gens réduisent les stimuli biologiques aux phéromones, mais en fait, beaucoup de choses entrent en ligne de compte. La période de la passion amoureuse est guidée par notre biologie, par de nombreux stimuli : il y a les phéromones, certes, mais aussi le sourire, le regard, les paroles, toutes ces choses qui nous attirent chez l’autre, et qui nous rendent addict à l’autre. En France, on veut faire une différence entre ce qui est physique et ce qui est spirituel. En tant que neurobiologiste et biologiste, je conçois le corps et le cerveau comme un ensemble fonctionnel qui produit le vécu spirituel.

En schématisant, on peut dire que l’amour, c’est un homme et une femme qui se rapprochent pour perpétuer l’espèce…

La reproduction est essentielle pour la survie de l’espèce. Chez les mammifères, très peu d’espèces sont monogames. Beaucoup se reproduisent sans “amour”, sans cette pulsion de rester ensemble, cette passion. Les espèces chez lesquelles on constate une monogamie sont celles où le petit est extrêmement vulnérable. C’est le cas du petit chez l’homme. Dans un milieu sauvage, un seul parent ne suffit pas à la survie du petit. La mère, qui allaite et qui doit assurer abri, alimentation, protection, laisserait par moments son enfant qui deviendrait alors une proie facile pour les animaux. Donc, le petit a besoin de deux adultes autour de lui jusqu’à l’âge où il devient un peu moins vulnérable. On voit ainsi l’utilité du phénomène “amour” qui oblige les deux parents à rester autour du petit…

Mais qu’en est-il des homosexuels, ou des couples qui ne veulent pas d’enfant ?

C’est pareil. C’est comme si l’on disait que les femmes qui prennent la pilule ne tombent plus amoureuses ! L’évolution a induit le phénomène de l’amour, qui existe dans le cerveau de tous les humains, que l’on fasse des enfants ou non, que l’on soit homosexuel ou non.

Il y a des histoires d’amour via Internet. Les phéromones n’y sont pour rien, en l’occurrence… Qu’en pensez-vous ?

L’homme est doté de parole. Celle-ci représente beaucoup de choses dans notre cerveau. Ce que les gens disent ou écrivent crée une conception de la personne dont on peut tomber amoureux. Quand on la rencontre physiquement, parfois on est fortement déçu, l’amour n’existe plus. Quelquefois, ça se renforce. Pour ma part, je suis sûre que l’on peut tomber amoureux de quelqu’un rien que par les paroles ou les écrits. C’est une particularité humaine : la parole permet d’évoquer des choses physiques. En parlant, je vous donne une impression de qui je suis, votre cerveau crée une image de qui je suis.

Comment aimeront les prochaines générations ?

L’évolution ne s’arrête jamais, la société change tout le temps, mais il y a eu un très grand changement dans notre système reproductif depuis les années cinquante : on a inventé la contraception efficace. Les femmes font des enfants quand elles veulent, ont le nombre d’enfants qu’elles veulent. Cela a beaucoup changé notre façon de concevoir la reproduction. Et du coup, on remarque des changements dans les histoires d’amour. Les hommes et les femmes ne jouent plus les rôles stéréotypés d’il y a une génération, les divorces sont plus fréquents… Maintenant, les grandes histoires d’amour sont entre les parents et les enfants. Entre les parents, la durée de la passion est courte, les gens divorcent quand ça ne va plus, mais les grandes histoires, ce sont celles de parents qui deviennent passionnés par leurs enfants.

 L’Amour de A à X-Y, Où est passé l’amour ?, Petits arrangements avec l’amour, Comment devient-on amoureux. Tous publiés chez Odile Jacob.

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