Il y a un cauchemar qui, dans nos vies, revient toutes les semaines : le dimanche. Dans ce continuum d’ennui, chaque seconde compte triple. Et chaque espace entre les secondes est un vide qui nous pèse sur le moral. Le dimanche est mou. Son pouls ralentit. Il s’étire en longueur et se dilate doucement à n’en plus finir alors qu’on voudrait déjà qu’il s’achève. Le dimanche est lent, morne, silencieux. La vie se tait. Les humains se cachent. Ça sent la mort. Partout. En toute chose. Le dimanche, même les lieux se transforment brutalement, s’agencent autrement. Leur géométrie change. Le dimanche tord la matière, la malaxe, la façonne à sa manière. La fait sienne. Rues, jardins, appartements prennent une autre dimension. Celle d’un au-delà glauque et désert. Mais il y a pire encore que le dimanche… le mois de novembre ! Novembre est un dimanche à lui tout seul. Il est 30 dimanches d’un coup ! Résigné, le monde s’allonge alors, revêt son linceul et attend son heure. Celle d’hiver. Celle qui change alors qu’on ne lui a rien demandé. Celle qui nous plante la nuit dans le dos dès 17 heures. Novembre est sombre, il a une odeur. Il sent l’humidité d’une cave qui s’imprègne sur un vêtement. Il est une pellicule de bruine qui se dépose sur la peau et bouche nos artères.
Même les jours en ont marre de vivre. Ils raccourcissent leur espérance de vie pour laisser place à la nuit. Ils n’en peuvent plus de novembre ! Cet abysse sans fond, ce trou noir qui aspire la lumière et l’espoir. Novembre a l’esprit médiocre. Il respire la petite vie, le destin raté. En novembre, mêmes les guerres sont lâches et sans ambition. Elles n’ont plus le courage de faire des morts et préfèrent sonner l’armistice. Vaincues, elles rendent les armes. Rien ne peut venir à bout de novembre. Aucun remède, aucun traitement. Novembre défit les horoscopes comme les shamans. Novembre recouvre l’humanité de sa cendre. Il n’existe qu’une seule solution pour échapper à novembre : fuir. Partir dans une autre saison. Contre un billet d’avion pour l’hémisphère sud, novembre ne peut rien. Car là-bas, il a un frère jumeau qui s’appelle l’été.