Après les paillettes de la haute couture chez Nina Ricci, un passage dans un bureau de style, Lucille Léorat a rejoint la douceur du cachemire. Des collections qu’elle tricote depuis 15 ans. Marie-Zélie Moser
L’âge de raison ? « Je ne l’ai jamais eu, le plus grand compliment que l’on puisse me faire c’est : tu es folle ! » Pourtant aujourd’hui, c’est Lucille qui est la directrice du style chez Eric Bompard : « se renouveler, innover, se nourrir mutuellement, ça se fait en laissant pas mal de liberté. Moi je fais de l’arbitrage et je dois veiller à l’épanouissement des personnalités ». La petite Bretonne née à Roubaix, se rêvait vétérinaire, infirmière, et même en Fantômette, inspirée par la bibliothèque verte. Elle aurait aussi aimé être une Valérie Lemercier, « l’humour, ça sert tous les jours ». « J’ai beaucoup changé d’idée, je me voyais bien directrice d’école, j’avais un peu ce côté scout et j’aimais beaucoup l’histoire ». Sa mère et sa grand-mère lui ont sans doute donné le goût de la couture « si j’avais envie d’avoir un spencer noir avec des boutons dorés, ou une robe pour une soirée elle me la faisait en un rien de temps ». Après une année en droit, sur les bancs de la fac où elle s’ennuyait, Lucille rejoint S Mode.
Créative mais pas que
C’est à 20 ans qu’elle pense à faire ce métier : « styliste ça me va bien c’est sympa d’exprimer sa fantaisie dans son métier, mais c’est aussi un job d’organisation de planning, il faut maîtriser la technique, avoir une expertise des machines, des matières, et savoir dessiner. L’anglais parfait est le sésame, pour développer et produire. La créativité ce n’est qu’une partie des compétences. » Elle fait sa deuxième année à Munich. Elle appréciera le bureau de placement de l’école : « j’ai trouvé un stage tout de suite et j’ai participé au concours Colbert où je suis arrivée 2e pour Nina Ricci. J’ai adoré ces quatre ans dans cette maison : les défilés, les mannequins, les belles mailles…. » Après son fils aîné, (elle en a 3), elle crée une collection de tricots pour bébé, c’est comme ça qu’elle rencontre Eric Bompard qui l’embauche. « J’ai abandonné l’idée de créer ma boîte, finalement je suis un bon lieutenant, j’aime le travail d’équipe. » souligne Lucille.
Le style Bompard
Une superbe liane rousse se glisse dans la nouvelle collection pour le prochain shooting du catalogue de la rentrée. Lucille commente, s’amuse, réajuste les détails, valide les looks avec son équipe. C’est à Saint-Ouen, au siège, que Lucille dirige les les collections Bompard. « Eric et sa fille nous laissent exprimer notre créativité ». Imprimé léopard, elle a osé, mais avec la noblesse du cachemire ça ne peut pas faire vulgaire. Le Pancho, une belle inspiration new-yorkaise, d’il y a 7 ans. Version courte ou longue, zippée, avec ou sans torsades : « c’est le couteau suisse de la mode, on le porte sur un pyjama, dans l’avion, à la plage, sur une robe ». La maxi étole, les imprimés sur voile de cachemire, sans oublier les pulls fités pour homme. « Aujourd’hui je suis moins dans l’opérationnel, Claire s’occupe de l’interface avec les usines. Je suis plus promoteur, nous sommes tricoteurs experts et spécialistes du cachemire. Nous travaillons avec un service après-vente comme les chaussures ou les sacs de luxe, on accompagne nos produits : on apprend à déboulocher, à entretenir son cachemire et surtout on teste tout pour ajuster le tricotage d’une maille trop lâche ou trop serrée, les couleurs qui résistent aux lavages… Des chemises et des cachemires ultra fins. »
Les tendances de la rentrée
Les pantalons taille haute et large en bas, en drap de laine, en cuir, en jean, trop formel avec une veste, alors on met un très beau pull fantaisie. Les tops sont larges et crocs, c’est ce qui est nouveau cette année le large en haut et en bas ! Une faute de goût ? « Même si dans mon métier on part du principe que tout est possible, si non on ne crée pas, les baskets à talons compensés ou le court devant et long derrière, c’est comme un croque-monsieur au homard ! »