L’alimentation est l’un des principaux leviers de prévention du cancer. Le professeur Philippe Bougnoux explique pourquoi.
Qu’est-ce que le cancer ?
Le cancer est provoqué par une altération des gènes, un désordre chromosomique. Le risque de désordre s’accroît avec l’âge. Les facteurs d’altération se trouvent dans notre environnement immédiat. Les deux principaux sont le tabac et l’alimentation. Les cancers les plus fréquents sont ceux du sein, de la prostate, du colon et, bien sûr, des poumons. Le cancer est une maladie des pays riches (à l’exception notable du Japon). La grande majorité des cas est concentrée en Amérique du Nord, en Europe du Nord et en Australie. C’est, en France, la première cause de mortalité chez les 25-65 ans. Les éventuelles prédispositions génétiques importent peu face au poids de l’environnement. On a ainsi observé le cas de populations ayant migré de l’Asie (moins touchée par la maladie) vers les États-Unis. Au bout d’une génération, les personnes d’origine asiatique ont le même risque de développer un cancer que les autres habitants. « Avoir les yeux bridés ou la peau noire ne change rien », résume le professeur Bougnoux.
Peut-on éradiquer le cancer ?
On peut retarder les risques d’apparition d’un cancer et donc les risques d’en mourir. Et ce d’autant plus que, dans la plupart des cas, le cancer est une pathologie tardive. La prévention prend donc tout son sens. « Les enjeux sont considérables », martèle le chercheur.
En dehors du tabac, quels sont les facteurs qui augmentent les risques ?
Le surpoids, le manque d’activité physique, l’alcool, les suppléments alimentaires et certaines catégories de lipides. Les plus dangereux sont les « acides gras trans », des acides gras polyinsaturés de type « Omega 6 », que l’on trouve tout particulièrement dans la pâtisserie industrielle. Les faire disparaître des produits alimentaires est « une lutte permanente », reconnaît le biologiste.
À l’inverse, comment le prévenir ?
Par de l’exercice d’abord. Trente minutes de « marche rapide » quotidienne permettent de brûler notre trop-plein de calories qui favorise l’altération cellulaire. Par l’alimentation ensuite, bien sûr. « Cinq fruits et légumes par jour », la viande blanche plutôt que la rouge, le poisson plutôt que la viande, beaucoup de légumes verts. Ces derniers ainsi que les produits de la mer en général contiennent des « Omega 3 », une forme bénéfique de lipides qui bloquent l’action néfaste des Omega 6. Le régime alimentaire qui correspond le mieux à ces préconisations est celui, désormais réputé, des populations qui vivent autour de la Méditerranée.
Les antioxydants peuvent-ils jouer un rôle ?
Oui en prévention, car sinon, ils ont pour effet de « protéger la tumeur ». Ils ne doivent en tout cas pas être consommés de manière médicamenteuse. Le surdosage est dangereux. Il suffit de manger des aliments qui en contiennent, comme la carotte, le raisin, la courge, l’orange ou encore l’huile d’olive.
Et le jeûne ?
La « restriction calorique » s’est avérée efficace sur des rats. Mais chez l’homme, elle doit être utilisée avec précaution, car la dénutrition, la carence alimentaire, peuvent au contraire aggraver la situation.
Le professeur Philippe Bougnoux est biologiste des cancers à la faculté de médecine de Tours et directeur scientifique du « Canceropôle grand ouest ». Ses propos ont été recueillis dans le cadre d’une récente conférence au muséum d’Orléans.