C’est à Jean Zay que l’on doit l’idée du festival de Cannes. Alors ministre de l’Éducation nationale et des Beaux-Arts, il imagine un festival du film international en réponse à la Mostra de Venise de 1938 sous l’emprise des fascistes et des nazis. 80 ans après, Alex Lutz était le maître de Cérémonie de ce grand événement culturel orléanais. Nous l’avons rencontré au Café du Théâtre, à l’issue de la cérémonie d’ouverture.
En 2017, vous avez choisi de vous installer à Orléans avec votre femme et votre fils.
J’adore les pulsations des capitales, mais après les attentats, Paris est devenue une ville anxiogène. Au départ, je cherchais un terrain de loisirs pour mes chevaux. Orléans, c’est une ville qui prend une petite vengeance par rapport à certaines grandes villes, c’est la pulsation exacte de notre identité française. Nous allons bientôt nous installer dans une maison à Combleux, j’aime beaucoup aller à l’Auberge de la Marine.
Vous connaissiez le rôle de Jean Zay dans la création du Festival de Cannes ?
J’ignorais totalement son rôle concernant le projet du Festival, mais je connaissais ses faits d’armes pour l’éducation, en tant que ministre. Jean Zay, c’est l’idée du bien commun. Ce qui est touchant, c’est le chemin de cet homme.
Comment avez-vous vécu cette cérémonie d’ouverture ?
Avec beaucoup d’émotion lors des discours d’Olivier Carré et d’Hélène Mouchard-Zay. Les forces brunes s’attaquent toujours à la culture en premier, parce que la culture est suffisamment forte pour vaincre la bêtise.
Que pensez-vous des artistes qui s’engagent ?
Quel que soit son métier, il n’y a pas de gêne à avoir sur son engagement. Même si je suis meilleur faiseur de films que tribun ou ministre. L’engament premier est dans ce que l’on fait, sa conscience et son rapport au monde.
Pour revenir à l’actualité, quel regard portez-vous sur les accusations portées contre Roman Polanski ?
Il y a des polémiques à tout bout de champ, et parfois en excès.
Mais je trouve vertueuse la prise de parole des femmes, malgré
le délai de prescription. Ce qui est difficile, c’est que ces faits devraient être portés devant les tribunaux, mais l’objet artistique se retire devant la douleur.
Pensez-vous qu’il faut dissocier l’homme de l’artiste?
Talent ne rime pas toujours avec bonté de cœur, certains salauds ont du talent, ils ont au moins ça. C’est compliqué d’être entier et de ne pas rester prudent, mais ça abîme le lien à l’artiste, je pense.
Propos recueillis par Marie-Zélie Cupillard