Le magazine féminin des Orléanaises (depuis 2010)

Voyage au pays du libertinage

Franchir les limites et vivre une expérience inédite que la morale interdit… Trois Orléanaises l’ont fait et acceptent de nous raconter les dessous du libertinage.

Au XVIIe siècle, le libertinage désignait des courants de pensée remettant en cause les dogmes religieux établis.
L’un de ces dogmes étant celui du péché, les libertins s’en sont donc aussi pris aux tendances religieuses culpabilisantes concernant la sexualité, surtout à partir du XVIIIe siècle.

L’échangisme, lui, est une pratique sexuelle qui consiste, pour des couples, à échanger sexuellement leur partenaire avec d’autres couples. Il ne s’inscrit pas nécessairement dans une optique de critique philosophique des dogmes religieux, et ne revient donc pas, en toute rigueur, au libertinage. Aujourd’hui cependant, les deux termes sont souvent associés, voire confondus.

 

Une parenthèse sensuelle

Jeanne, 40 ans, divorcée

La première fois : après 15 ans de mariage, pendant lesquels j’ai finalement inhibé mes désirs et ma véritable sensualité, j’ai découvert le libertinage avec mon nouveau compagnon. Il m’a emmenée dans une soirée privée et très chic à Tours, où tout était permis. J’ai pu réaliser mes fantasmes ! L’environnement luxueux ressemblait à une boîte de nuit : bar, piste de danse, musique, et même hammam ou piscine privée. C’était une grande récré !

Les codes : tout était possible, c’était « open sex » : fétichisme, sado-maso… J’ai découvert une ouverture d’esprit, une autre façon d’approcher les gens et la vie. On accepte les différences physiques, culturelles, d’âges. Il n’y a pas d’hommes insistants, on dit oui ou non, le désir de chacun est respecté. Et le silence est de mise. Le seul interdit : échanger son téléphone et se revoir en tête-à-tête. Cela doit rester une parenthèse.

Le couple : s’il y a des failles, cela peut le faire craquer. C’était à la fois une complicité entre nous et un jeu de pouvoir. Mais aussi, d’une certaine façon, une mise en danger de notre couple. Je pensais que c’était une façon de maîtriser les relations de mon homme avec les autres femmes.

 

Relations sans engagements

Sophie, 45 ans, célibataire

La première fois : j’étais jeune, j’avais 25 ans, j’ai suivi mon compagnon de l’époque dans une soirée privée. C’était un week-end en Provence, dans une belle maison, avec de belles personnes. J’étais jalouse et j’ai mal vécu le moment je n’étais pas prête à partager celui que j’aimais. Le lendemain, j’étais triste. Aujourd’hui, je suis célibataire. Après des déceptions sentimentales, j’ai décidé de profiter de la vie et je fréquente des clubs parisiens. Mais je n’aimerais pas y croiser des Orléanais ! Je n’y vais jamais seule, je suis toujours accompagnée. Je mets des robes très sexy. Il y a tous les âges et tous les physiques.

Les codes : il n’y a aucune obligation, on peut juste regarder. Le respect de l’autre et l’anonymat sont la règle.

Le couple : je ne cherche plus l’homme de ma vie, mais celui de ma nuit.

Du piment à la séparation

Sabine, 52 ans, divorcée

La première fois : j’étais mariée depuis 20 ans, dans une relation fidèle. Avec mon mari, nous avons d’abord découvert un club dans la région. Des amis nous en avaient parlé. J’ai eu une sensation de rejet au départ. La clientèle n’était pas à notre goût. Nous avons visité, bu un verre, mais il ne s’est rien passé. Mon mari nous a inscrits sur des sites de rencontres spécialisés, en me disant que ça ne nous engageait en rien. Il a beaucoup tchaté, posé des questions, pour trouver un couple qui nous corresponde. Nous avons finalement rencontré Paul et Alice. Nous les avons retrouvés lors d’un week-end en Bretagne. Nous avons chacun pris une chambre, moi avec Paul, et mon mari avec Alice. Nous nous sommes revus, Je me suis sentie comme ensorcelée par Paul, et finalement j’ai quitté mon mari. Paul n’était en fait qu’un manipulateur ; il n’a jamais quitté sa femme, mais aujourd’hui encore, il me téléphone, comme s’il avait des droits sur moi. Mais je ne souhaite plus le voir.

Les codes : finalement, on découvre ses propres réactions. Au départ, j’étais gênée et mon mari très à l’aise. J’avais l’impression de découvrir un autre homme.

Le couple : il faut un couple très solide. Le mien n’a pas résisté. λ

 

L’AVIS DE David Simard, sexologue


Les libertins sont perçus comme avides de sexe, voire pervers. Quelle est votre analyse ?

Il y a 100 ans, tout ce qui sexuellement n’était pas une pénétration vaginale était considéré comme pervers ! Ce terme recouvre généralement un jugement moral, et il n’y a pas à juger moralement les libertins. L’important est que tous (toutes) les participant(e)s soient consentant(e)s. Les libertins ont un rapport au sexe qui sort des normes sociales (le couple sexuellement exclusif). Le champ de leurs pratiques est plus large que la normale, mais cela ne suffit pas à les désigner comme forcément avides de sexe. Il y a par ailleurs des personnes non libertines qui sont avides de sexe.

 

Quels risques prend-on en passant du fantasme à la réalité ?

Le premier risque est celui de la déception, la réalité pouvant être moins bien que le fantasme. Peut également surgir un sentiment de jalousie auquel on ne s’attendait pas, qui peut conduire à reprocher à l’autre le passage à la réalité même si on l’a soi-même souhaité. La confiance dans le couple peut en pâtir. Mais cela peut aussi très bien se passer.

 

Les libertins ne mettent-ils pas leurs couples en danger ?

Cela dépend des couples, et tout d’abord du véritable accord des deux conjoints pour ce type de pratiques. Le libertinage peut mettre en évidence un décalage sur le plan sexuel dans le couple. Par ailleurs, si le couple est déjà fragilisé, le libertinage (pour redonner du piment sexuel), pas plus que le fait de faire un enfant, ne fera reculer cette fragilisation. Il y a aussi des cas où l’un des conjoints prend goût au libertinage au point de ne plus pouvoir envisager de relations sexuelles plus classiques avec son conjoint. Mais il existe d’autres cas où le libertinage est un fort ciment du couple, lorsqu’il permet aux conjoints de développer une profonde intimité et complicité sexuelle, sur la base d’un lien puissant au niveau des fantasmes. Ce peut aussi, inconsciemment, être un moyen de contrôler les relations aux tiers, en évitant ainsi les relations extraconjugales cachées. Ce n’est cependant pas une garantie absolue.

 

David Simard, philosophe et sexologue, auteur de 150 idées reçues sur l’amour et le sexe (First, 2012). www.amouretsexualite.com

 

 

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