Le magazine féminin des Orléanaises (depuis 2010)

Tu seras un homme mon fils mais pas un macho !

On ne naît pas macho, on le devient. Puisqu’Éric Debarbieux soulignait récemment sur France Culture* que « presque toutes les violences entre élèves ont un fondement sexiste ; ce qui est perçu comme féminin, y compris le fait d’être bon élève, peut être utilisé dans le harcèlement », rappelons que c’est pendant l’enfance qu’il faut montrer, sans tarder, la voie pour que les garçons d’aujourd’hui qui feront les hommes de demain respectent les différences et notamment les personnes de l’autre sexe. Dès lors, quel exemple donner quand on est maman ? Quels sont les petits trucs simples à mettre en œuvre ? Sébastien Drouet

 

Ah, la relation mère-fils… D’épais traités de psychologie ont été consacrés à ce lien essentiel, dont la particularité s’explique : « Lorsqu’une mère met au monde une fille, elle sait à quoi s’attendre, écrit Jeanne Dompierre sur canalvie.com. Alors qu’avec un fils, non. Impossible de recréer sa propre enfance. Pour compenser sa peur de ne pas savoir s’y prendre, elle va avoir tendance à trop couver, plus qu’elle ne le ferait avec une fille. » De plus, elle est, dans les premières années de la vie de son fils, la première femme, sans rivale – avant que ne survienne la maîtresse d’école. Inconsciemment, elle transmet à son petit son propre rapport au masculin.

La castratrice délétère
Se fondant sur son expérience de psychanalyste, Alain Braconnier, dans son livre Mère et fils, a mis en évidence 5 profils-types**, dans lesquels vous vous retrouverez

peut-être :

La mère bienheureuse et bienveillante. Équilibrée, attentive, laissant au père toute sa place dans l’éducation du fils, elle aime celui-ci « normalement », ne le frustre de rien. Contrôlant parfaitement ses émotions, elle évite de se montrer trop mère poule pour ne pas être gênante vis-à-vis des autres. « Cette mère sait et accepte qu’il y a ce que son fils raconte et ce qu’il ne raconte pas », écrit A. Braconnier. On s’en doute, c’est la maman rêvée pour que le jeune garçon devienne à l’aise dans sa masculinité et respectueux de la féminité.

La mère amoureuse et passionnée. N’ayant d’yeux que pour sa progéniture, elle projette sur son fils son idéal masculin, le promet à de hautes destinées, lui dessine un futur doré. « Tu seras toujours l’amour de ma vie, pense-t-elle, tu es le plus beau. » Étouffante ? C’est à voir. Car le fils choyé de la sorte n’en sera que plus confiant en lui, montrera une belle assurance affective, même si, avec un tel modèle, il mettra du temps à trouver chaussure à son pied !

• La mère protectrice et féroce. Elle peut l’être pour différentes raisons. « Elle peut craindre, à juste titre, la mauvaise influence d’un tiers : le père, sa propre mère, un copain ou un groupe malsain, un enseignant maladroit, etc. Les circonstances de la vie peuvent aussi susciter ce type d’attitude. » Mais ce peut être aussi une personne égoïste, qui ne cherche qu’à poursuivre sa relation privilégiée avec son fils, à qui elle transmet, en même temps que son anxiété, une dépendance affective.

La mère possessive et castratrice. Elle manifeste bruyamment la souffrance qu’elle ressent de voir s’échapper son fils. Un peu comme Marthe Villalonga dans Un éléphant ça trompe énormément, vous voyez ? Dominatrice, autoritaire, elle va créer un être peureux et frustré. Voire pire. Selon Flavia Mazelin Salvi**, « les hommes peuvent faire preuve de violence, verbale ou physique, lorsqu’ils se sentent agressés dans leur masculinité par les femmes, se vengeant ainsi de toutes les humiliations maternelles. »

La mère craintive et distante. Anxieuse, dépressive, « son malheur interne l’occupe parfois trop pour qu’elle puisse laisser libre cours à la tendresse et à l’amour qu’elle ressent pour son enfant », indique A. Braconnier. Comme elle a peur de mal faire, cette maman-là se met en retrait. Résultat : le fils se sent mal-aimé. C’est, par rapport à la question qui nous occupe, la mère qui a l’une des plus mauvaises influences sur son fils, l’amenant à développer une certaine misogynie. Puisqu’il n’a aucune confiance en l’amour, ni dans les femmes, il est froid, distant, comme la mère qu’il a connue…

Conseils à suivre

Au-delà de ces profils caractéristiques, en prenant pour cadre une relation normale – et partant du principe que les garçons copient les pères, et que c’est donc à ces derniers de montrer le chemin –, quelles attitudes la mère doit-elle adopter de son côté pour que son fils ne devienne pas un homme sexiste ? En faisant en sorte qu’à la maison, le père ne reste pas assis dans son fauteuil à regarder la télé pendant qu’elle fait la vaisselle, c’est entendu, mais encore ?

En juin 2017, un article du New York Times, « How to raise a feminist son ? » (« Comment élever un fils féministe ? »), a fait sensation. Claire Cain Miller y délivrait de simples conseils, avalisés par des psychologues, neurobiologistes et autres spécialistes, qu’Edith partage à son tour :

• Laissez pleurer vos petits garçons.
Qui a décrété que les garçons étaient forts et ne pleuraient pas ? On peut évidemment être doux, émotif, et fort tout à la fois, la force pouvant être canalisée au service du bien, et non pour la violence.

• Apprenez-lui à s’occuper de lui.

• Favorisez les amitiés féminines.

• Apprenez-lui que « non » veut dire : « Non » !

• … et que « fille » n’est pas une insulte.,

• Lisez-lui des livres ayant pour héros… des héroïnes. 

• Indignez-vous devant lui contre l’intolérance et le sexisme.

Nous en indiquerons un autre, en rapport avec le dernier point : de manière générale, ne laissez passer aucun dérapage chez l’enfant. « Lorsqu’un garçon tient des propos sexistes sur une camarade d’école, il faut tout de suite lui demander comment il réagirait si quelqu’un disait la même chose sur sa mère ou sa sœur », recommande la sociologue Delphine Dulonc***. Une vigilance qui n’est pas réservée qu’aux mères, les pères ayant évidemment toute leur place dans la lutte pour l’égalité femmes-hommes****…  

*« Les Masterclasses », 1er juillet 2018. Éric Debarbieux est le président de l’Observatoire européen de la violence à l’école.

**Listés et complétés sur psychologies.com, article de Flavia Mazelin Salvi : « La mère à l’origine du mâle ».

***20 minutes, 30 mai 2018.

****Dans le cadre d’une famille monoparentale, les spécialistes préconisent d’exposer le garçon à des modèles masculins consistants. 

 

 

Du rose pour les filles, du bleu pour les gars ?
Laisser les petites filles porter du rose et les gars jouer aux petites voitures ? Oui, heureusement ! Car « c’est ainsi que l’enfant construit son identité sexuée dans un premier temps, selon la psychologue Ane Dafflon Novelle. Forcer son fils à jouer à la poupée risque d’être contre-productif. » C’est comme tout, résumerons-nous : en toute chose, il faut de la mesure, de l’équilibre. Il s’agit de varier, compléter, sans exagérer. Cela étant dit, en 2018, quel jouet est vraiment fait pour les filles ? Les poupées, alors que les papas manient le porte-bébé comme des pros ? Les dînettes, alors que les mâles sont de véritables cordons bleus (qui assurent, en plus, le débarrassage et le lavage de la vaisselle) ? Et quels jouets sont réservés aux garçons ? La panoplie de policier, comme s’il n’y avait pas de policières ? Les voitures miniatures, comme si les femmes ne conduisaient pas ?

 

Une crise de la masculinité ?
L’égalité à tout crin aboutit-elle à une remise en cause de la masculinité ? Partager les tâches ménagères, se placer sous les ordres d’une supérieure hiérarchique, est-ce perdre en autorité, en virilité ? C’est ce qu’affirment les « suprémacistes mâles », en proie à un mal-être profond. Vraie crise ? Non. Selon les scientifiques qui ont étudié la question, il s’agit de « discours de crise », comme il en a toujours existé, et non de crise réelle. Ainsi, pour Francis Dupuis-Déri, professeur de sciences politiques à Montréal, « le discours de la crise de la masculinité est toujours l’occasion de réaffirmer une division radicale de l’humanité entre le masculin et le féminin, d’associer cette masculinité à certaines qualités stéréotypées (action, compétitivité, voire agressivité et violence) et de prétendre que le féminin est à la fois différent, inférieur et dangereux pour les hommes, puisque l’influence féminine serait pathologique et entraînerait un déclin, voire une disparition des hommes. ». Or, les études sur de prétendus symptômes de la crise de la masculinité (suicides, problèmes scolaires, divorces…) montrent que les femmes n’en sont pas la cause (ouf !). Au contraire, c’est l’identité masculine conventionnelle qui est un facteur de risque. « Dans le cas des suicides, par exemple, le haut taux chez les hommes s’explique notamment par l’association de la virilité aux armes à feu et la confusion entre identités masculine et professionnelle, ce qui rend les hommes plus vulnérables au chômage, poursuit Francis Dupuis-Déri. Les épidémiologies notent ainsi que les hausses des suicides accompagnent les crises économiques, dont les femmes ne sont pas responsables, puisqu’elles ne gèrent pas l’économie. »
Il faudra trouver autre chose…

Source : « La pseudo crise de la masculinité ou la revanche du mâle » (10/05/2018), sur lepoint.fr

 

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